Micrologies

L'Aventure, genre littéraire


Jean-Yves Tadié a publié un essai remarquable sur le roman d’aventures (1) : quatre chapitres, en fait, sur Dumas, Verne, Stevenson et Conrad, précédés d’une ample introduction qui tente de définir le genre avant tout par une « phénoménologie de la lecture », c’est-à-dire par l'étude des effets de lecture recherchés, surtout le suspens et l’identification.

Tadié tente aussi de définir le roman d’aventures par opposition à des genres voisins : le romance anglais (le roman romanesque, romantique) renvoie à des univers imaginaires, volontiers mystérieux (Walter Scott, Emily Brontë) ; à la différence du roman gothique ou du roman de science-fiction, le roman d’aventures exclut le fantastique ; le roman policier a au départ une démarche plus intellectuelle (Poe, Gaboriau) ; plus tard, l’énigme en disparaît au profit de l’atmosphère (Simenon, Chandler) ; le roman d’espionnage est plus spécialisé (Greene) : il est de type politique, sans mettre en jeu la condition humaine en général ; le roman-feuilleton est avant tout une technique de publication et non un genre ; le roman populaire est un roman social et non un roman de l’individu (Sue) ; quant au roman historique, il a l’histoire pour sujet et non l’individu : dans Waverley, roman historique de Walter Scott, l’histoire de l’Écosse au XVIIIe siècle est au cœur même du roman ; dans Enlevé !, roman d’aventures de Stevenson, la même période n’est qu’une toile de fond. Enfin, « le roman d’aventures littéraire commence au style » ; il est œuvre d’écrivains, il se caractérise par la pluralité des sens, par la puissance de l’imagination (plus que par la complexité de la structure).

Autant d’approches fécondes, parce qu’elles sont croisées, non exclusives, sans esprit de système. De plus, on voit avec bonheur revisitées et considérées dans cet ouvrage les lectures qui étaient celles de la jeunesse.

1. Le Roman d’aventures, Paris, 1982 ; éd. de poche, 2013.



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