Micrologies

Vertus et Vices


Le système chrétien des Vertus et des Vices relève d’une élaboration historique complexe, d’une théologie bien humaine. Ainsi les allégories de Prudence dans sa Psychomachie n’ont aucune valeur théologique. La première liste connue, celle des péchés cardinaux, remonte à Grégoire le Grand (v. 540-604) : vanité, envie, colère, avarice, acédie, luxure et gourmandise. Pour Duns Scot (1266-1308), cette liste laisse de côté le désespoir et l’incroyance. Avec Thomas d’Aquin apparaît en face des Vices la liste des sept vertus, cardinales (prudence, tempérance, force, justice) et théologales (foi, espérance et charité). Giotto, dans la chapelle de l’Arena à Padoue, part de la classification thomiste des vertus, à laquelle il associe des vices contraires, dans la perspective scotiste : prudence/folie, force/inconstance, tempérance/colère, justice/injustice, foi/incroyance, charité/envie, espérance/désespoir. De la liste grégorienne, seules demeurent la colère et l’envie. Les couples de Vertus et de Vices se font face sur les deux murs latéraux de la chapelle, les Vertus à gauche et les Vices à droite quand on regarde vers le Jugement dernier peint au-dessus de l’entrée, les unes donc du côté du Paradis et les autres du côté de l’Enfer.

On trouve toutes ces informations dans un article de Nancy Hornicker (1), qui s’intéresse au projet iconographique de Giotto. On peut ainsi noter que les Vertus sont représentées par celui-ci plutôt de façon frontale et symétrique (mais pas l’Espérance, qui prend son envol vers le Christ) et les Vices de biais, en position de déséquilibre. Au centre de la composition, justice et injustice disposent de niches en trompe-l’œil plus ornées : allusion sans doute aux difficultés du temps.


1. « Réflexions sur un symbole médiéval », FMR, nouvelle série, 28, 2008, pp. 55-70.


Giotto, Justicia, Injusticia, chapelle des Scrovegni, Padoue.
[Public domain], via Wikimedia Commons.


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